Guadeloupe. Les violences faites aux femmes par des VIP sexuels
Trois-Rivières. Samedi 9 mars 2024. CCN. Les violences faites aux femmes commis par des agresseurs sexuels VIP occupent une place singulière au plan clinique : elles se trouvent à la frontière entre les enjeux sociétaux et les enjeux psycho-pathologiques. Leur visibilité sur la scène sociale est pour beaucoup liée aux facteurs politiques et sociétaux, comme en témoigne l’évolution de la réponse sociale et de la variabilité des sanctions judiciaires à l’encontre de ces auteurs VIP. Ces derniers avancent masqués, tapis derrière un illusoire sentiment d’immunité psychique qui les rend intouchables dans leur représentation mentale. Pour l’heure les femmes de la Guadeloupe, gardent un silence pudique, mais il est certain que le moment viendra où elles prendront elles aussi la parole pour dénoncer toutes les violences subies…
Il s’agit ici, d’une part, de tenter de comprendre qu’est-ce qui peut pousser des VIP (des artistes, des hommes politiques, des monstres sacrés du 7ème art, des journalistes, des intellectuels de renom, des thérapeutes, des religieux…) à commettre ces actes terribles d’agression sexuelle ? Quelle peuvent être leurs motifs ? Pourquoi prendre de tel risque de souiller leur propre image par la violence de leur acte ?
D’autre part, de s’interroger sur le profil de ces agresseurs sexuels VIP qui semble aussi varié que leurs victimes. Même s’ils sont différents, ils paraissent semblables puisqu’ils jouissent d’une puissante notoriété et respectabilité sur la scène sociale, d’un statut d’homme de pouvoir et pour certains du statut de « citoyen d’honneur. Ils établissent une relation asymétrique par rapport à leurs victimes (femmes ou mineures) et abusent de leur pouvoir pour commettre ces actes délictueux.
Par ailleurs, de donner quelques points de repère et de précisions quant à la contribution des travaux psychanalytiques consacrés à ces actes de violence sexuelle.
Il est à noter qu’il n’y a pas d’étude spécifique sur le groupe des agresseurs sexuels VIP, mais Jean Proulx affirme dans son ouvrage Pathways to sexual agression publié en 2014 que tous les agresseurs sexuels ont des troubles de la personnalité.
1/ Comprendre pour traiter et éviter la récidive
La clé de compréhension de cet agir violent passe par une investigation globale de la personnalité des agresseurs sexuels VIP. La méthode des épreuves projectives (test du RORSCHACH, le TAT) s’avère utile et offre au clinicien une aide précieuse pour appréhender la complexité des fonctionnements psychiques de ces auteurs d’agressions sexuelles. C’est un outil de médiation qui facilite la verbalisation et permet à l’auteur de tels actes d’exprimer des éprouvés.
2/ les protocoles de Rorschach et de TAT d’agresseurs sexuels ?
La fragilité des assises narcissiques, les difficultés à gérer les mouvements pulsionnels envahissants, l’échec des mécanismes défensifs face au surgissement de l’angoisse sont autant de traits communs à la plupart de ces protocoles. Si le recours aux épreuves projectives confronte le sujet plus ou moins directement au corps, il vient souligner l’atteinte des processus de représentation, de fantasmatisation et de symbolisation. Toutefois, la passation de ces tests projectifs ne saurait être exploitée pour une quelconque prédiction de récidive d’agressions sexuelles. Malgré une forte demande sociale et juridique, il est de notre éthique de psychologue clinicienne de résister à la tentation de vouloir prédire ces comportements qui restent si dépendants de multiples facteurs psychiques, sociétaux, politiques, environnementaux et demeurent si lourds d’énigme.
Aussi le combat doit continuer pour le respect fondamental des droits des femmes, et de leur liberté Pour la lutte contre toutes les inégalités sociales et discrimination sexuelle à l’instar de ce qu’on appelle l’éveil des consciences.
A lire les travaux de Balier,C. La violence en abyme, Paris, 2005, PUF
Marie Lise Salin
Docteure en Psychologie Clinique
