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Guadeloupe. A lire d’urgence. L’estime de soi des noirs en pays colonisés.

Pointe-à-Pitre. Lundi 04 janvier 2021. CCN. «Nég sé dènyé jénérasyon apré krapo. »Proverbe Afro-guadeloupéen cité par l’auteur et qui donne le ton de cet ouvrage. Patricia Braflan Trobo a frappé fort, très fort. L’essai qu’elle vient de publier à L’Harmattan *, sera pour longtemps LE livre que chaque colonisé afro descendant, conscient mais surtout inconscient de son état, devra lire et relire. J’avoue que depuis la lecture des 2 ouvrages fondamentaux de Frantz Fanon «Peaux noires et masques blancs» et «Les Damnés de la Terre» dans les années 60, je n’avais rien lu d’aussi fort nous concernant. En fait Patricia Braflan-Trobo (PBT) qui est docteure en sciences humaines et sociales, s’attache de livre en livre à réexaminer, inventorier, mieux, ré-analyzer tous les traumas de nos sociétés colonisées et post-esclavagistes. C’est dû à la démarche qu’elle s’est fixée depuis près d’une dizaine d’années *. Avec son dernier ouvrage, «L’Estime de soi des Noirs», elle réussit avec brio ce que tous ces coachs formés à l’occidentale et qui pullulent depuis peu, n’ont toujours pas compris ou voulu prendre en compte:

Dès les premiers chapitres de son ouvrage PBT, explique quasi pédagogiquement ce qu’est basiquement l’estime de soi: «Une notion complexe» qui nous concerne.

Elle en donne d’ailleurs une bonne définition: «L’estime de soi est la perception qu’une personne à sa propre valeur. Il s’agit du jugement que cette personne porte sur elle-même. L’estime de soi peut-être aussi affiché comme l’affirmation de soi ».

Et un peu plus loin, l’auteure PBT prend le soin de préciser: «L’estime de soi demande de pouvoir parfois rester impassible par rapport aux autres (…) admettre que l’on ne peut pas plaire tout le monde (…) que cela n’est en rien grave … »

C’est là où PBT est «fondamentale par rapport à nos entraîneurs habituels, c’est qu’elle va aussi passer au crible de notre société actuelle, cette estime de soi, cette absence de confiance en soi. Dès lors, on comprend qu’il ne suffit pas uniquement d’utiliser, voire puiser jusqu’à l’épuisement dans les ouvrages des spécialistes ou des chercheurs en développement personnel, mais qu’il faut aussi s’astreindre à une analyse très pertinente de nos sociétés coloniales.

C’est en ce sens que l’ouvrage de PBT va beaucoup plus loin que ceux de Fanon. Le psychiatre martiniquais, il faut l’admettre, ne sera jamais dépassé dans sa radioscopie des colonisés que nous sommes, mais Fanon, il faut aussi le souligner, écrit en pleine guerre de l’Algérie pour son Indépendance nationale est à ce titre un combattant pro-FLN, mais il ne s’est pas, on peut le dire, suffisamment attaché à pénétrer tous les domaines et croyances du quotidien du colonisé.

Fanon est de ce point de vue, «éloigné» de sa terre natale, ses ouvrages tous essentiels, sont d’abord des «armes» dans le combat anticolonialiste, tout particulièrement celui des Algériens, des Africains et par extension des autres peuples colonisés.

PBT elle vit dans la Guadeloupe du «jôdi jou», un pays qui croupit encore sous la domination coloniale française (nos coachs made in France le savent-ils? , mais tous les traumatismes de notre situation post-esclavagiste. PBT les analyser les uns après les autres, les causes réelles de ces «manques de l’estime de soi» qui sont récurrents chez les colonisés afro-descendants: l’autodénigrement, les complexes, les jugements des autres et aussi, notre attitude face aux «blancs» qui nous désirons comme des «Noirs». Mais PBT va là où Fanon ne s’est pas aventuré, elle analyse avec une grande finesse par exemple ces proverbes négatifs qui nourrissent et règlent nos comportements des uns envers les autres.

Qui en Guadeloupe, n’a pas eu au moins une fois dans sa vie, lors d’une difficulté relationnelle, professionnelle, politique à lâcher en désespoir de cause, le trop célèbre «neg pa sa, travay épi neg ou pire konplo a neg sé konplo a chyen »?

PBT y consacre tout un chapitre à ces soi-disant «prophéties» qui compliquent notre existence et détériorent notre vivre-ensemble. Car en fait, ce sont tous ces complexes, ces «proverbes» et pseudo prophéties qui jalonnent notre quotidien et dont nous avons tant de mal à nous en débarrasser.

Le livre de PBT est donc une étape incontournable dans la prise de conscience de ces problématiques. Ainsi, il nous semble important que les colonisés et tous ceux qui par leur profession (psychologues, coaches, psychiatres) sont missionnés pour travailler à notre mieux-être mental, comprend l’importance fondamentale qu’il y a d’analyser nos sociétés dans leur bobine.

Il en est de même pour nos politiques, PBT ne s’est pas (encore?) Penchée sur leur cas, mais son livre les concerne et j’ai envie de dire au premier chef, car ce sont eux qui ont choisi de vouloir faire «Avancer» notre pays en prenant une part à la «responsabilité» et à la vie du citoyen.

Mais comment-ils veulent s’acquitter de cette tâche s’ils ont encore à se croire et se dire “français” affirmant urbi et orbi que la Guadeloupe, notre pays, n’est qu’un département français et sous-estimer les ravages et dégâts psychologiques d’une société post-esclavagiste et toujours sous domination coloniale?

Sur ce plan, PBT complet ÉTAIT: @FrantzFanon, @AlbertMemmi @MelvilleJ Herskovits, @Edward W. Saïd, @michelleiris @ericwilliams
Tous ceux qui ont déjà écrit sur les sociétés coloniales. La contribution de PBT est aussi d’une grande importance.

* «L’Estime de soi des Noirs»: Guadeloupe la conjuration des prophéties

L’Harmattan.

210 pages

ccnfirst.COM

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